Retour sur notre visite à la Ferme d’Orvilliers du samedi 27 juin 2020

Classé dans : Nos témoignages | 0

Les Biocoopains sont très attachés aux visites chez les producteurs locaux qu’ils organisent régulièrement afin de découvrir, ensemble, les savoir-faire et le quotidien de nos agriculteurs et fournisseurs bio. Retour aujourd’hui sur celle qui s’est déroulée le 27 juin dernier à la Ferme d’Orvilliers, à Broué, et qui fournit en quinoa bio les deux Biocoop du Mantois d’Epône et de Mantes-la-Jolie. Mais le quinoa n’est pas leur seule activité… très loin de là ! Une bien belle découverte que nous vous invitons à suivre ici.

Une très grande ferme isolée au milieu des champs, à 2 km du village de Broué, au nord de la Beauce. On est ébloui par le pigeonnier majestueux au milieu de la cour fermée. Dreux est à 15km, Houdan de même.

Entrée par la cour de la ferme

La visite commence à 14 h par les présentations. Autour des associés  de l’EARL[1] Ferme d’Orvilliers, les biocoopains et les  clients de la vente directe dans le magasin du village. On sort tout juste du confinement, on respecte les gestes barrière…

Le projet, les associés

Les deux frères Adrien et  Benjamin Pelletier ont repris l’exploitation familiale en 2012 ; ils ont été rejoints rapidement par Hélène Chaudy. Le projet des associés sur 50 ha c’est la culture de céréales et légumineuses et la production de pain en agriculture biologique. En résumé : créer de la valeur du grain au pain. Une filière intégrée, maitrisée avec création d’emplois, offre de formation et de recherche.

Benjamin : le chef mécanicien et aussi meunier et boulanger. Il s’est formé pendant six ans chez un paysan-boulanger au cœur du Jura. Nettoyer, ébarber, décortiquer, séparer, trier, sont des étapes exigeantes après la récolte. Benjamin est le Géo Trouvetou de l’équipe.

Adrien : l’ingénieur agronome. Ancien technicien auprès des Chambres d’Agriculture et de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique. Il apporte la théorie aux pratiques quotidiennes de la diversité des métiers que l’on a en tant que paysan-boulanger. Il est le co-auteur d’un livre : Paysans Boulangers Guide (très) pratique.

Hélène: la boulangère. Infirmière reconvertie ayant animé une Amap dans le Mantois. Elle s’est formée avec Daniel Boitard [La Couronne des Prés] et Olivier Ranke [La Bergerie de Villarceau]. Aujourd’hui Hélène est aussi la gérante légale de l’EARL et parfois encore infirmière (allo maman bobo !).

Les cultures

Benjamin nous fait découvrir les cultures. Il rappelle les principes de l’agriculture biologique : nourrir et prendre soin du sol, pratiquer des rotations longues, avoir des semences adaptées au terroir. Il n’exclut pas la technologie pour mieux désherber mécaniquement (exemple GPS) et l’utilisation de produits autorisés en bio pour protéger les récoltes des maladies et ravageurs.

Engrain (ou petit épeautre)

Les céréales cultivées sont principalement : blé, petit épeautre (engrain) épeautre, seigle. Aussi orge, maïs et triticale. Dans la rotation des cultures, on trouve la luzerne, les féveroles, les lentilles, les pois, le quinoa. Le climat de la région n’est pas propice à la culture de sarrasin. Les récoltes non transformées sont vendues dans le circuit de l’agriculture biologique.

Benjamin nous montre le petit épeutre

On fait des essais de cultures et des recherches avec des blés anciens ; ils sont meilleurs pour la panification.

Les variétés paysannes sont plus résistantes à la sécheresse, grâce à leurs racines fines. Ce sont des variétés plus tardives, car plus en adéquation avec la minéralisation naturelle du sol, qui se produit quand il commence à faire chaud.

Les variétés barbues sont très courantes dans les variétés paysannes. Les barbes sont un amortisseur pour le vent et protègent des ravageurs.

Blés anciens

https://www.lechorepublicain.fr/chartres-28000/actualites/des-essais-pour-creer-un-ble-unique-en-eure-et-loir_11984910/

Les associés ont investi dans des machines pour trier et séparer les céréales,  décortiquer le petit épeautre. La succession des différents appareils de triage permet d’éliminer les déchets, les impuretés et les graines d’adventices. La pratique reste « low tech » avec la récupération et l’adaptation de matériels d’occasion.

Avec l’agrandissement prochain des surfaces en culture biologique, les associés envisagent la construction d’un silo. Il prendra place dans un ancien entrepôt de pommes de terre.

Le moulin

A l’étage du bâtiment principal (une ancienne bergerie réaménagée) on découvre deux moulins à meules de pierre de type Astrié. Ce sont des moulins à meule de pierre : les grains sont écrasés lentement ce qui réduit l’échauffement. De plus, le germe des blés n’est pas séparé de son amande. Tout ça rend la farine plus nutritive et digeste. Avant tout c’est de la farine T80.

Le « temps de plancher », c’est à dire la durée de conservation de la farine avant utilisation, est d’une à deux semaines. La farine est alors bien stabilisée.

Assortiments de farine

Le fournil

On cuit du pain trois jours par semaine : mardi,  jeudi, vendredi. Jours de vente au village.

Hélène nous explique les cinq différentes étapes de la fabrication du pain avant la cuisson; elle répond aux questions.

Elle rappelle ce qu’est le levain naturel : une fermentation d’eau et de farine qu’on « élève » consciencieusement. Le levain naturel en travaillant avec la farine va produire des acides organiques (acides lactiques, acides acétiques) et des composés aromatiques.

Hélène nous explique le travail de la pâte

Au préalable, elle énonce qu’on doit à chaque fois mesurer les températures :
t° de la pièce, t° de la farine, t° de l’eau de coulage.

1. pétrissage : dans le pétrin, on mélange farine, eau, sel et levain. Il s’agit d’un pétrin bras mécanique à bras plongeants. Pour que la pâte fermente dans de bonnes conditions, le boulanger doit veiller à obtenir une température finale de la pâte comprise entre 23 et 25° C

2. pointage : on laisse la pâte reposer dans le pétrin et fermenter. L’expérience du boulanger lui permet de décider quand la pâte est prête

3. pesée et détente : la pâte est divisée en pâtons, c’est à dire en boules du poids voulu qu’on laisse reposer une deuxième fois

4. façonnage : on façonne les pâtons en leur donnant la forme voulue. Les pains façonnés sont déposés sur des supports en toile de lin appelés couches.

5. apprêt : on laisse la pâte reposer une nouvelle fois pendant plusieurs heures. C’est le « temps de pousse » où la pâte triple de volume sous l’effet du gaz carbonique

Pendant ce temps, on prépare le four à 240°. En réalité le four n’est jamais éteint car il faudrait plus d’énergie pour le réchauffer si on le laissait refroidir. L’énergie est ici fournie par des granulés issus de biomasse. 

Hélène nous montre l’enfournement

Vient alors le moment de l’enfournement précédé de la « grigne » du pain : on entaille rapidement et  légèrement de pain en oblique ou arc de cercle.  Elle permet au pain de  lever à certains endroits bien définis, pas n’importe comment.

A la sortie du four, le pain est encore fragile et mou. Il est alors mis à l’air libre dans un environnement sec, pour refroidir pendant près d’une heure. C’est la phase de ressuage : la vapeur d’eau et le gaz s’échappent, le pain durcit, son enveloppe devient croustillante.

Les questions sont nombreuses. Le temps passe vite.

Un futur magasin de producteurs

Hélène annonce que les associés ont un nouveau projet : l’ouverture d’un magasin de producteurs où on trouverait à côté des paysans-boulangers : maraîcher, arboriculteur, éleveurs (viande, fromages).  Le projet a déjà séduit plusieurs personnes ; il sera animé  par François Taupin, aujourd’hui salarié de la Biocoop du Mantois à Epone.

Retour des parcelles

La visite se termine par un goûter offert par les associés au bout d’une grande table où sont proposés à la vente les différentes farines. Merci encore à Hélène, Benjamin, Adrien et François pour cette si belle visite !


[1] EARL exploitation agricole à responsabilité limitée.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *