Invités :
- Benjamin Chassagne : Les Brebis de Cravent
- Benoit Delmotte : gérant magasin Biocoop du Mantois
Les producteurs ont beaucoup investi les années passées pour améliorer leur rendement. La demande en bio étant croissante. Aujourd’hui, certains ont des dettes qui viennent peser sur leur trésorerie en baisse.
Les Brebis de Cravent (fromages, glaces artisanales)
La ferme comporte 43 hectares et entre 200 et 250 brebis. Au démarrage, il y a 10 ans, il y avait Benjamin qui travaillait à temps plein et sa compagne en temps partiel (avec un poste d’infirmière en parallèle). Actuellement, la situation est difficile mais l’envie de poursuivre est plus forte que les obstacles rencontrés. Cette année, il y aura des problèmes d’eau qui engendreront un manque de production de foin pour les animaux. Il faudra donc en acheter pour combler la baisse et nourrir les bêtes.
Il y a quelque temps, des haies ont été plantées mais les bénéfices sont attendus pour plusieurs années. La croissance des arbres est lente. Mais ensuite, les haies apporteront de la nourriture aux bêtes, entretiendront la biodiversité, créeront de l’ombre également et permettront de mieux délimiter le territoire de la ferme en Bio. En effet, les champs voisins, en agriculture conventionnelle, ne pourront pas trop s’approcher des haies pour répandre leurs pesticides puisque les haies viennent gêner la manipulation du tracteur. Un fossé est également créé du côté de la production Bio pour limiter l’impact des voisins sur les champs labellisés.
La ferme n’est pas une grande consommatrice d’eau, c’est un atout. En été le besoin est de 100m3 pour l’abreuvage des brebis et de 500m3 durant l’année entière. Ce qui est peu par rapport à une exploitation en maraîchage.
En conventionnel, les produits chimiques coûtent très cher et sont utilisés de façon, normalement, intelligente. C’est-à-dire les jours peu venteux et sur un terrain bien délimité. Cela permet à l’exploitation Bio voisine d’être un peu à l’abri des pesticides répandus (bien que nombreux et tristes scandales démontrent que cette solution n’est pas toujours fiable, les pesticides étant tout de même très volatils).
La ferme est ouverte au public 3 après-midi (mercredi / vendredi / samedi) pour de la vente directe. Le bâtiment est ouvert, ce qui permet de voir les brebis.
La Biocoop du Mantois
En 2022, il y avait 3 magasins : Epône, Mantes-la-Jolie et Freneuse. Malheureusement, le contexte actuel a contraint le groupe à fermer 2 magasins (Mantes et Freneuse).
Les gens ont beaucoup d’idées reçues sur la Bio qui serait notamment plus chère. Et pourtant, chez Biocoop, nous constatons que certains produits sont moins chers qu’en supermarché, la viande notamment. Le boucher ici fait des comparaisons régulièrement.
De plus, l’inflation en Bio est moins forte qu’en conventionnel. Il est important de rappeler que chez Biocoop, il y a aussi des valeurs défendues et un cahier des charges exigeant. Par exemple, aucun produit ne provient de serres chauffées. Les prix du Bio et du non Bio sont très proches d’une manière générale. Le label Bio soutenu par Biocoop garantit une qualité et un respect des produits et des producteurs. Les équipes restent à l’écoute des clients.
Le pouvoir d’achat baisse, c’est certain. Mais notons aussi que l’apparition de différents labels est très confusante pour le consommateur. Il y a par exemple, le label HVE (haute valeur environnementale).
Aujourd’hui Biocoop représente 20% du commerce équitable en France.
Constat : il vaut mieux plusieurs petits paysans qui forment un groupement solide (si un doit arrêter, il y a toujours les autres), plus qu’un seul agriculteur avec une énorme exploitation. Le jour ou celui-ci doit arrêter, l’impact est conséquent.
Le climat, l’ambiance actuelle est plutôt austère entre la guerre en Ukraine, le COVID,…
Y a-t-il de la triche dans la Bio ? Cela semble assez difficile. Il y a des contrôles 2 fois dans l’année et l’agriculteur qui souhaite être en Bio doit payer pour ça. Il n’y a donc pas d’intérêt à essayer de tricher et à risquer sa labellisation.
Pourquoi y a-t-il des déconversions de la Bio ? La Bio est plus technique donc il est plus simple de démarrer directement en Bio plutôt que de passer du conventionnel au Bio (même si bien sûr et heureusement, il est tout à fait possible, avec de la patience et du soutien, de passer en Bio).
On remarque que le monde agricole est contrôlé par les industriels. Lorsque la demande en Bio a augmenté, le mot d’ordre a été « passez en Bio ». Donc plusieurs exploitations sont passées Bio, mais pas pour les bonnes raisons… Lorsque la Bio a baissé, ces agriculteurs se sont vus fortement suggérer de quitter la Bio pour revenir en conventionnel.
La Bio dans les cantines ? Normalement, cela devrait venir en soutien à la filière Bio. 20% des aliments devraient être Bio. Hors aujourd’hui seulement 5% le sont…
Un repas qui coûte 10€, ne comprend dans son tarif que 1,50€ de matières premières. Tout le reste concerne les charges et autres frais.
Il est vraiment important de savoir pourquoi il est nécessaire de consommer de qualité.
Benjamin : « Ce n’est pas le Bio qui est trop cher mais le reste de l’alimentation qui n’est pas assez chère. » Pourquoi ne mettons-nous pas plus d’argent dans notre alimentation ? Les budgets transport, logement augmentent. Il y a aussi une pression de la société de consommation très forte.
A l’heure actuelle, en moyenne, le budget alimentation représente environ 5% alors qu’il y a quelques années il représentait 30%. Il est important de prendre conscience que l’on mange des aliments vivants.
Au-delà de la pédagogie, il faut de la solidarité. Les choses doivent avoir du sens, il faut résister aux pressions sociales.
Le groupe Biocoop reste positif quant à l’avenir car l’alimentation de qualité n’est autre qu’une question de bon sens !
Merci à nos invités pour cette riche discussion.
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